Diversification La tomate de Marmande reprend des couleurs
Frédéric Marchesin n’a jamais abandonné la culture de tomate en pleine terre initiée par ses parents. Mais il a diversifié sa production pour retrouver de la rentabilité.
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À trente-neuf ans, Frédéric Marchesin est la troisième génération sur l’exploitation familiale à développer la culture de la tomate. Celle-ci représente aujourd’hui un tiers de son chiffre d’affaires. Quand il s’est installé en 2008, la plante était déjà bien présente : ses parents avaient commencé à l’exploiter au début des années 1980 en remplacement du tabac. « Nous faisions de la tomate ronde de plein champ, pour le marché du frais et pour la transformation. Comme tout le monde, nous la vendions au cadran de Marmande, selon le système d’enchères dégressives, explique le cultivateur. Au début des années 2000, le cadran s’est arrêté. Nous avons travaillé avec un négociant privé jusqu’en 2012, puis nous avons rejoint la coopérative Valprim à Marmande, qui fait partie du groupe Rougeline. »
Variétés anciennes
Le producteur doit s’adapter à la concurrence, notamment celle des Hollandais. Ces derniers restent les premiers producteurs de la zone euro-méditerranéenne et les champions des rendements. C’est pourquoi la tomate ronde de Frédéric a migré du plein champ vers les abris en plastique, pour gagner en précocité. En revanche, fait assez rare dans le milieu de la tomate sous serre, la culture est restée en pleine terre. « Ceci afin de limiter les investissements », justifie Frédéric. Pas de chauffage non plus, à cause du coût de l’équipement énergétique et son approvisionnement.
Les plantes hôtes ont été livrées. Elles formeront une bande fleurie expérimentale dans les abris. L’idée est d’obtenir une installation pérenne d’auxiliaires. © H. Quenin/Signiel
« Les différences de rendements étaient vraiment très importantes, poursuit-il Nous arrivions à produire 15 kg/m2, alors qu’en hors-sol chauffé, cette même variété ronde approchait des 60 kg ! » Pour améliorer sa rentabilité, l’exploitant a changé de stratégie en 2014 et a opté pour des variétés anciennes : l’allongée cœur – souvent appelée cœur de bœuf –, la cornue et des côtelées, de couleur noire, jaune ou rouge. Elles sont goûteuses, et c’est un argument de vente de plus en plus recherché. Mais elles ont aussi leurs défauts. « Ces tomates sont moins productives : 12 kg/m2 en moyenne, toutes variétés anciennes confondues, et plus sensibles à certaines maladies, explique le maraîcher. Les côtelées se fendillent facilement. Les calibres sont irréguliers. »
De la fraise en hors-sol
Malgré ces difficultés, la marge remonte grâce à un prix producteur plus élevé. Au fur et à mesure des campagnes, Frédéric affine ses sélections, abandonnant les variétés trop fragiles, la tomate ananas par exemple, recherchant des variétés savoureuses, mais suffisamment productives. « L’usage des plants greffés est important pour baisser la sensibilité aux nématodes et améliorer les rendements », précise-t-il. Dans le même temps, l’exploitation s’est diversifiée avec de la fraise semi-précoce (gariguette en hors-sol, sous serre). Son calendrier de production se complète bien avec celui de la tomate, ce qui permet d’embaucher pendant une période plus longue et de fidéliser le personnel.
Obtenir une IGP
Le cours de la tomate, soumis à un marché concurrentiel, reste fragile. « L’année 2020 a été correcte, mais c’est loin d’être toujours le cas. Le secteur de celle destinée à la transformation souffre beaucoup », déclare Frédéric, qui a arrêté ce créneau en 2019.
Pour se démarquer, un collectif (1) travaille depuis 2016 à la défense et à la valorisation de la variété Marmande. Il a créé en 2020 la marque territoriale « Tomate de Marmande », afin de redonner de la notoriété à ce produit historique et mettre en avant des variétés gustatives, cultivées en pleine terre. Celle-ci concerne aussi bien les côtelées – rouge, jaune, noire – que les cœurs ou cornues, car « dans le Marmandais, on a toujours cultivé plusieurs types de tomates », souligne le producteur. La marque englobe également les produits transformés.
Un dossier de demande d’indication géographique protégée (IGP) est en cours d’instruction. « Les projets et les idées de diversification ne nous manquent pas, conclut Frédéric. Mais pour les concrétiser, il nous faudrait plus de main-d’œuvre. Mais c’est une denrée rare. »
Hélène Quenin
(1) Au sein de l’Association des fruits et légumes du Lot-et-Garonne (AIFLG) avec 16 producteurs en frais (14 ha) et 83 en transformé (500 ha), en pleine terre.
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